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Don Quishepp présente une biographie poétique et humoristique du jazzman américain Archie Shepp comparé au célèbre héros de la littérature : Don Quichotte.
Dans ce poème dédié au musicien, les mots (les voyelles, les consonnes, les rimes) sont utilisés comme autant de notes de musique afin de conserver les rythmes évoqués : le Blues, le Bop, le Cool, le Free… la saveur du swing, en d’autres termes, cette « musique avant toute chose » que l’on appelle le « Jazz ».
Les musiciens et acteurs de ce « bop-moovie » en sont donc bien sûr Archie Shepp, John Coltrane, Duke Ellington, Charlie Parker, Bill Evans, George Gershwin, Stephen Mc Craven, Mina Agossi, Bernard Lubat, Claude Nougaro, Horace Parlan, Aldo Romano…
Et, comme il n’y a pas de poésie sans rhétorique, le tempo de l’aventure se déroule sur plusieurs types de textes : narratif, descriptif, didactique… Le dialogue aussi – évidemment.
Dans cette farce « héroï-comique » se mêlent plusieurs disciplines et références : la blague potache et l’analyse scientifique, le poncif et le fait historique, le romantisme, la sociologie, l’anthropologie, la psychanalyse, la pataphysique, la presse people et le mot d’esprit… dans un registre allant de l’exclamation à l’alexandrin, de la sottise à l’harmonie imitative, de la liberté à la contrainte, de la phrase quotidienne à l’heptasyllabe.
Et, comme il n’y a pas de cinéma sans « cinémot », un soin tout particulier est accordé à la photographie. Les images accompagnent la prosodie. Les images visuelles donnent le la aux images sonores.
On croise toutes sortes de personnages et de nombreuses stars viennent consteller le récit… Cervantes, Hugo, Molière, La Fontaine, Rimbaud, Verlaine, Rostand, Vian, Nietzsche, Onfray, Freud, Lacan… du guignolo au philosophe, du niquedouille à l’enchanteur, de Mimie Matie à Fabrice Luchini… afin de restituer la jubilation des musiciens, la simplicité de leur souffle, de leur respiration même. Dans le jaillissement de l’enthousiasme de l’improvisation.
Le livre « Chaman » présente un conte philosophique versifié et dialogué – par 2 chats anthropomorphes- dans lequel de nombreuses références sont faites à l’histoire des arts (littérature, cinéma, peinture, sculpture, écologie, land art, danse, musique…), références qui viennent illustrer la célèbre phrase : « tout est langage ».
L’adaptation cinématographique (envisagée à l’écriture) peut être sous 2 formes : un long métrage traditionnel et un film d’animation, plus didactique.
La réalisation du film tentera de mettre en lumière un principe constant de la narration : la polysémie du mot écrire, graphein en grec, c’est-à-dire, à la fois, écrire et peindre. Double acception mise en exergue par la graphie du titre Chaman, avers et revers d’une même médaille, deux faces d’une même forme géométrique, comme le ruban de Moebius.
En effet, d’un graphein primaire, (du grec « graver des caractères »), adviennent tantôt des images tantôt des textes. Photographie, cinématographie, échographie, encéphalographie, holographie en 3D, paléontographie, infographie, stéganographie (cette partie du film étant sous la direction du Dr Michel Schiro agréé par le ministère de la recherche et de l’enseignement supérieur et conseillé spécial auprès de l’ONU pour ses découvertes sur « l’écriture primordiale » : expositions, publications, courts-métrages sur You Tube et dossier de presse disponibles ; laboratoire de recherche «Eureka » 34, avenue des Champs Elysées à Paris, ONGI « Universalis Matter » et Institut Skyrô ) sont autant de disciplines convoquées qui illustreront la poésie du texte, pour rendre visible l’invisible.
Rappelons qu’à l’origine, dans de nombreuses écritures comme, entre autres, les hiéroglyphes, il y a la double dimension visuelle et graphique.
Le dédoublement du graphein revient, fait retour, dans l’art contemporain, quand les images et les textes sont intriqués, entrelacés.
Et, dans l’histoire de la littérature, inconsciemment le chat est à la fois un symbole féminin et masculin ; il se rattache à la féminité d’une femme ou à l’anima d’un homme. Avec un chat, l’inconscient montre la capacité du rêveur à évoluer, la possibilité pour sa psyché de se faufiler entre les obstacles pour, d’un bond, devenir totalement autre.
Selon la « science des rêves », ce potentiel à vivre des transformations radicales est un symbole positif et le chat peut également souligner le besoin pour le rêveur – et, donc, pour tout un chacun – de changer intérieurement du tout au tout.
Vers quoi évoluer ? Vers davantage d’indépendance – de Liberté. Par indépendance, nous entendons le besoin d’être soi, de s’affranchir de toutes les barrières qui nous empêchent (parfois inconsciemment, à notre insu, à notre corps défendant) de devenir nous-mêmes.
Par liberté, entendons celle que donne la connaissance (rendre perceptible et visible l’invisible), le savoir comme saveur (comme l’indique les auteurs auxquels le texte fait référence : Chaplin, Picasso, Rimbaud, Montaigne, La Boétie, Galilée, Wynton Marsalis, Marcus Miller, louis Armstrong, Ella Fitzgerald, etc.). Lumière ou Liberté par la connaissance également soulignées durant tout le récit par l’anaphore « Je sais… ».
Surhomme ; Extrême ; Extraordinaire ; Titanesque… Oui ! Elvin Jones a marqué la musique au sceau des sons. Tous ceux qui ont joué avec lui se sont sentis portés vers d’indescriptibles sommets musicaux. On a tout dit sur ce quartet, cette période – leur musique : idiosyncrasie de toutes les musiques. Ici, deux extraits : Jazz In Marciac 1998. Paris Jazz Festival 2000.
Vulcain ; excessif ; démesuré ; hors-norme … Oui. De même que tout jazzman vous dira qu’il y a un avant et un après J-C – entendre John Coltrane – les mêmes vous diront qu’il y a un avant et un après Elvin Jones. John & Jones ; Elvin & Trane : Jones Coltrane ? Ces 2 noms sont à jamais unis au sceau du swing.
Tendre ; technique ; pondéré ; précis… Oui. Comme un danseur voluptueux. Il n’est que de citer Alain Gerber dans son admirable portrait d’Elvin évoquant un disque qui m’est cher : « L’ensemble des titres du microsillon « Ballads » font la démonstration des mêmes qualités : punch, inventivité, précision et virtuosité. Peut-être faut-il admirer davantage les superbes codas où l’artiste s’envole littéralement et porte aux nues notre plaisir : elles donnent la mesure de son pouvoir, celui d’un majestueux ordonnateur d’espace, sondant les couches profondes de l’âme pour y faire germer la plus vibrante émotion. »
Ami(e)s de la poésie, écoutez la première plage « say it ». 4 musiciens ; un quartet. John Coltrane, Elvin Jones, Mc Coy Tiner, Jimmy Garrison. Mais écoutez les autres aussi…
On pourrait associer à la musique d’Elvin Jones nombre de citations écrites en vers forgés à l’endroit desquelles on ne peut pratiquer l’oreille de bois (sauf à passer à côté de la beauté et rester de marbre…). On songe, entres autres, à la bouche d’ombre soufflant le verbe Hugolien, au « je ne cherche pas… je trouve ! » de Picasso abolissant les hiérarchies et les frontières stylistiques entre les arts, au langage « transmental » (zaoum) du poète futuriste russe Velimir Khlebnikov, au portrait sans âge du poète que brosse en continu Michel Onfray dans sa contre-histoire de la philosophie, à la « joie authentique » de Leucippe, aux « Illuminations » – titre éponyme d’un album d’Elvin – d’Arthur Rimbaud : « J’ai découvert quelque chose comme la clé de l’amour ! » « Et j’ai vu ce que l’homme a cru voir ». Alchimie du verbe !
On pense également à la chronophotographie d’Etienne Jules Marey, au divisionnisme de Giacomo Balla, au violoncelliste d’Anton et Arturo Bragaglia, aux expériences analytiques de Man Ray, aux portraits d’Henri Cartier-Bresson…
J’ai voulu, dans ce livre, être le plus neutre possible. N’introduire aucune poétique. Aucun effet, aucun surréalisme qui ferait in fine apparaître un portrait « plus vrai que nature ». Aucune intentionnalité de tentative de construction d’un « personnage conceptuel » Deleuzien que j’associe volontiers à cet être littéraire que Sartre définit ainsi dans les mots : « Tout un homme, fait de tous les hommes et qui les vaut tous et que vaut n’importe qui. » Au contraire, montrer le langage du musicien, « l’ami des muses », en toute objectivité. Sans artéfact, l’âme de l’homme. Tel qu’il est. Tel quel. Tel qu’Elvin. En lui-même. En tant que substance diversement modifiée, « jamais tout à fait le même ni tout à fait un autre » dirait Verlaine. Photographie des profondeurs. En noumène, mais dans son ipséité phénoménologique.
Ne pas intégrer d’éléments symboliques dans la composition, ne pas utiliser la technique (profondeur de champs, focales, vitesse, superpositions, etc.) pour interpréter sa psychologie. Utiliser la photographie comme miroir de SA lumière. Car Elvin travaille L’image (sonore !) – l’image du son – mais pas son image. Il ne travaille pas son image (de marque…) mais marque l’image (d’ailleurs, lors de ses prestations, pas de restrictions de prise de vues pour les photographes, complicité respectueuse…). L’image donne à voir. Et, en bon esthéticien, Elvin développe sa puissance d’affirmation, persévère dans son être, existe, Ek-siste, en – soi/pour – soi, prend plaisir à donner plaisir.
Cet autre paragraphe d’Alain Gerber dans portrait en jazz aux éditions Renaudot : « Il me paraît désormais hors de doute, après m’être attaché plus particulièrement à l’étude de sa musique, que ce créateur a pour l’œuvre qu’il pétrit avec son ami Coltrane une tendresse profonde. C’est comme s’il se mettait tout entier dans les contrepoints qu’il offre au chant désespéré et triomphant, formidablement serein au-delà des déchirures, du saxophoniste. C’est comme s’il voulait s’enfoncer dans le vif de l’angoisse humaine pour l’écarteler et hurler plus fort que le destin. C’est comme s’il voulait montrer que dans un monde absurde on peut être homme et avoir quand même raison. »
Bien sûr, on est du côté de l’impossible, de l’irénisme, de la pensée magique ; ce sont des musiciens qui poursuivaient ce vieux rêve d’un art fonctionnel. Oui, il y en a qui veulent tout dire ; qui parle pout tout dire. Sans souci du « Lacan-dira-t-on » ! Elvin a épousé la philosophie Coltranienne qui contenait tout de même cette citation, qui, à tout le moins, peut laisser perplexe : « Je voudrais pouvoir apporter aux gens quelque chose qui ressemble au bonheur. J’aimerais découvrir un procédé tel que si j’avais envie qu’il pleuve, il se mette aussitôt à pleuvoir. Si l’un de mes amis était malade, je jouerais un certain air et il serait guéri ; lorsqu’il serait fauché, j’interpréterais un autre air et, immédiatement, il recevrait tout l’argent dont il aurait besoin ».
Ces images montrent, à fortiori en expo, la granulation de l’émulsion, la fugitive lumière fusant du visage, les notes muettes –bleues- , l’image immobiles du corps suspendu, le rayon de l’instant spécial, le Kairos, le sidération, la musique des sphères, le tumulte, le grouillement, le bouillon des origines, la soupe atomique.
Qui n’a jamais rêvé d’un appareil apatride, un appareil photos, un
« photocktail », distillant des scènes merveilleusement inouïes, duquel
chaque émotion serait convertie en mélodie sur l’émulsion – en liqueur
d’accords – ; duquel chaque note colorée viendrait impressionner de leur
mélodie lumineuse l’infinie multitude du dégradé du nuancier de sel
d’argent comme la vague océane inonde le sable sec de la plage (page ?)
plate… et, se retirant, ne laisserait qu’une harmonie picturale mélodieuse
(AOC : « harmolodie », Appellation d’Ornette Coleman !) émergeant du
silence et poursuivant sa croisière jazz sur l’écume des joies sensorielles au
vent de vigoureuses voyelles qui vibrent secouées par le rythme cadencé
que scandent d’incandescentes consonnes, au souffle des swings qui
sonnent, au « hasard objectif » des Iso ?
Ami(e) s du Swing, du South, du Son et du Soleil
Du magret, du Madiran et de l’Armagnac
Des tournesols et des mélodies nonpareilles…
Well ! Une seule adresse : volez à Marciac !
« Sans la musique la vie serait une erreur » disait Nietzsche. Sans la poétique la vie ne serait pas une gageure… semblent ajouter Rosemonde Cathala et Lydie Solomon unies, dans ce spectacle, comme les notes d’une même partition, comme les mains d’une même âme, et, qui incarnent, à l’envi, les 2 âmes mélancoliques d’un même amour mélodieux : celui –inimitable- de George Sand et de Frédéric Chopin.
La muse et poète.
La lumière et son ombre.
Le miroir et son reflet.
Le théâtre et son double.
L’Un et l’Autre.
Si l’on se demande qui est qui dans ce jeu des je (et ce ne sont pas les incalculables exemples de la littérature qui nous contrediront ni… ceux de la vie quotidienne) c’est parce que les deux sont indispensables à l’autre. Complémentaires.
L’un et l’autre jonglent avec le jeu des genres, du temps, des styles, des disciplines afin d’arriver à ces fameux « précipité véridique de rêve » comme nous le vaticinait dans un « souffle » surréaliste cet autre « athlète du cœur » qu’était qu’Antonin Artaud.
C’est donc dans cette obscur clarté de cette autre scène qu’est l’Astrada de Marciac que l’on vient écouter les noirs profonds, les fines températures de couleurs, les transpirantes notes agiles, les sons colorés des musiciens… « A noir, E blanc, I rouge, U vert, O bleu : Voyelles, Je dirai quelque jour vos naissances latentes… »
Où l’on vient écouter de la musique. Se ressourcer. Au calme. Le silence, c’est la mélodie qui reprend son souffle… « La musique, c’est du bruit qui pense » disait même le père Hugo (qui fut également l’ami de plume de George Sand).
Ecouter la « note bleue » nous saisir et nous envelopper sans que nous en connaissions bien les causes. Mais en 4 temps logiques selon le psychanalyste A. Didier-Weill*. Jusqu’à ce que l’auditeur mélomane la reçoive comme un don, comme une monnaie d’échange, jusqu’à l’émergence, l’explosion de ladite « note bleue ». Sublimation. Qui surprend l’auditeur. Parachève son plaisir dans une pure instantanéité. Photographie sonore !
De Sand à Chopin, de la poésie à la musique, de Nadar aux frères Lumière, du classique au jazz, d’Art Blakey à Wynton Marsalis, de Miles à Marcus Miller et Christian Scott, de Scorsese au Rolling Stone, de Mick Jagger à James Brown, de Biréli à Django, de Léonie Briard à Hugo qui déclarait à sa muse : « Je ne suis qu’un poète ; toi tu es la poésie ».